La volonté américaine de se retirer du Moyen-Orient n’a pas seulement laissé la porte ouverte à la Russie et aux puissances régionales pour occuper le terrain et en tirer avantage.
N’ayant que peu de choix, le gouvernement du Premier ministre Hassan Diab – soutenu par le Hezbollah lui même soutenu par l’Iran et ses alliés – sollicite l’aide de la Chine, une approche que le groupe militant chiite soutient fermement.
Aujourd’hui, vous ne m’en voudrez pas, pour chercher, selon le vieil adage « à qui le crime profite », si je fais un peu de géopolitique internationale bien ancrée dans l’économie mondiale du temps présent. Car j’ai une idée, certes un peu audacieuse, mais pas absurde…
Les ayatollahs qui se veulent les représentants de Dieu sur terre n’ont donc pas d’autre choix que de se jeter dans les bras des communistes chinois, afin de sauver leur pouvoir, tout en comptant sur la bénédiction de leurs alliés Russes.
Beyrouth, dans l’empire perse
Vue de Téhéran
Beyrouth fait partie du nouvel empire perse qui étend aujourd’hui, à travers l’Irak et la Syrie, son emprise jusqu’aux rivages libanais de la Méditerranée. C’est un immense succès historique pour les ayatollahs, la réalisation de la grande revanche du chiisme sur le sunnisme, et le retour de la grandeur perse. Ça c’est le côté glorieux. Côté bien moins reluisant, l’Iran, soumis à un blocus financier et politique, confronté à une chute terrible des prix du pétrole, saigné par une guerre extérieure qui lui coûte 16 milliards de dollars par an (au bas mot, car elle entretient le Hezbollah au Liban et le Hached al-Chaabi en Irak) , est un empire en faillite à la recherche désespérée d’argent. Acculé, Téhéran a signé le 25 juillet avec la Chine, un traité économique de 25 ans, dont bien des clauses restent encore mystérieuses.
Cet accord secret a aussi une dimension militaire : la Chine déploiera 5 000 membres de ses forces de sécurité sur le sol iranien, une concession sans précédent dans l’histoire de la République islamique

Beyrouth et les «Routes de la Soie»
La Chine, elle aussi en difficulté sur le plan économique et politique, a l’avantage de réserves financières gigantesques, à savoir plus de 3,200 milliards de dollars de réserves de change, auxquels s’ajoutent 2 000 tonnes d’or dont le volume augmente de cent tonnes par an, Pékin achetant à tour de bras sur le marché international. Grâce à cette gigantesque capacité, la Chine poursuit les avancées de son agenda mondial, lançant toujours plus loin et solidement les tentacules d’un projet global qui porte le nom poétique de « Routes de la soie », mais dont la réalité est plutôt rugueuse. L’Iran et la Chine ont en commun un adversaire redoutable : les États-Unis, ce qui seul a facilité un rapprochement somme toute inattendu entre la plus grande puissance communiste du monde et une république cent pour cent théocratique.
De son côté, Pékin est plus que satisfait de signer des accord avec des dictateurs, d’ignorer les violences qu’ils font subir à leur peuple et de piller leur nation pour faire avancer ses projets d’hégémonie mondiale.
Oubliez les États-Unis, la France et les pays arabes du Golfe, et tournez-vous vers Pékin : c’est le leitmotiv que l’axe pro-iranien ne cesse de scander au Moyen-Orient. C’est aussi l’option que défend le quotidien libanais Al-Akhbaraprès la double explosion qui a ravagé la capitale libanaise.
Par ailleurs, si les États-Unis restent un client très important de la Chine, le premier de tous demeure l’Europe où Pékin bénéficie de nombreux amis et relais d’influence, notamment à Bruxelles. Si l’accès à la Méditerranée a toujours été une obsession perse, cet accès est aussi, aujourd’hui, une exigence fondamentale des Chinois pour la réalisation de leurs Routes de la soie, le grand œuvre du nouvel empereur chinois, Xi-Jin Ping. Dans cette région, la Chine ne dispose actuellement que d’une base militaire et de facilités portuaires à… Djibouti, donc du mauvais côté du Canal de Suez, autre goulet d’étranglement potentiel pour les marchandises «made in China». Rien n’est donc aujourd’hui mieux monnayable pour l’Iran à l’égard de la Chine que le port de Beyrouth, extrémité d’un axe de transport terrestre – loin de la puissance navale américaine – traversant Sin-Kiang (le pays des Ouïghours), Afghanistan (dont les Américains se retirent actuellement), Iran, Irak, Syrie et Liban – la vieille route de Marco Polo…
Elle n’est pas belle la vie ?
Une explosion au bon moment
Or, ne voilà-t-il pas que, une semaine après la signature de ce traité historique entre la Chine et l’Iran, le port de Beyrouth n’existe quasiment plus ! Il est entièrement à reconstruire. Providentiel, pour la Chine qui s’est fait une spécialité de la réalisation d’infrastructures portuaires. Il est donc hautement prévisible que le consortium qui sera choisi par le gouvernement libanais sous tutelle Hezbollah-Iran, soit basé sur un projet chinois. À peine l’encre sèche de leur traité historique qui sauve financièrement l’Iran et lui donne les moyens de jouer les gros bras régionalement, la Chine se voit ainsi immédiatement remerciée – voire partiellement remboursée – par « l’acquisition » du port méditerranéen qui lui manquait !
Quant à la destruction des quartiers de la Quarantaine, de Gemmayzé, Mar Mikaël ou Achrafieh, ils auraient été ainsi sacrifiés sans hésiter sur l’autel des ambitions mondiales de la Chine et des besoins d’argent de l’Iran. En tout cas, un point en commun de plus entre la Chine et l’Iran : tous deux se contrefichent des chrétiens, ceux du Liban en particulier.
Un stock de nitrate qui tombe bien, ou…
Et l’arme du crime ? Comment a eu lieu l’explosion ? Dans la logique ci-dessus, la plus probable serait une explosion terroriste, déclenchée par un des nombreux experts en explosion terroriste de tout format dont dispose, au Liban, l’Iran. Un stock de nitrate d’ammonium qui tombait drôlement à point ayant été l’occasion qui a fait le larron. Mais l’on parle beaucoup, à Beyrouth d’un rugissement de moteur aérien, entendu par de multiples témoins, juste avant la grande explosion. Alors, si l’on veut aller un peu plus loin dans l’audace, parlons d’une arme dont le nom de code chinois est DF-17 (Dong-Feng -Vent d’Est- 17). Il s’agit pour le lanceur d’un missile balistique emportant un « planeur hypersonique », le DF-ZF, volant à près de dix fois la vitesse du son, que la Chine a présenté lors de sa grande parade militaire d’avril 2019, et dont la puissance explosive serait considérable. Recouvert d’un matériau nouveau, il ne laisserait aucune signature radar.
Prendre Position
Le DF-17 est vu par les experts militaires, comme l’arme qui permettrait aux Chinois, dans le cadre d’une confrontation avec les Américains en Mer de Chine du Sud – pour Taïwan, par exemple – de frapper et détruire les bases américaines de Guam, et, au Japon, celles de Nagasaki et Yokosuka, ports d’attaches de trois flottes de porte-avions. Le DF-17, d’une portée estimée à 2 500 kilomètres, monte très haut (60km) , largue son planeur hypersonique lequel rebondit sur la couche atmosphérique, avant de descendre en un « piqué » vertigineusement rapide. Science-fiction ? Non, malheureusement. Le Pentagone cherche la parade et a alloué récemment un budget à cet effet à la firme Northrop. Évidemment, la destruction du port de Beyrouth par l’indétectable DF-17-ZF – dont la mise en service effective avait été annoncée pour 2020 – serait la bienvenue comme un message aux Américains …
Mais le gouvernement du Premier ministre Hassan Diab – soutenu par le Hezbollah soutenu par l’Iran et ses alliés – sollicite l’aide de la Chine, une approche que le groupe militant chiite soutient fermement.
Il marche sur une corde raide.