L’ANTISÉMITISME DE LA FRANCE D’AUJOURD’HUI SERAIT-IL MOINS VIRULENT QUE CELUI D’HIER ? OU A-T-IL CHANGÉ DE VISAGE ?

Rappelez-vous du film de Polanski «J’accuse»

À 86 ans, Roman Polanski démonte l’engrenage de «L’affaire Dreyfus ». Une toile de maître à la manière du XIX e siècle et un portrait vivant de notre époque.

C’est une image iconique : la dégradation du capitaine Dreyfus dans la cour de l’école militaire. L’officier face au soldat qui brise son sabre contre son genou. Le nouveau Polanski commence là, le 5 janvier 1895. Néanmoins, le cinéaste ne reproduit pas exactement la célèbre gravure d’Henri Meyer. Il choisit l’angle opposé. Parmi les spectateurs et les visages que l’on distingue à peine dans la vignette des manuels scolaires se tient un témoin indifférent.

« J’accuse » n’est pas un film sur Alfred Dreyfus ou Emile Zola. Il raconte l’histoire du lieutenant-colonel Georges Picquart. Picquart, comme la très grande majorité des Français, est convaincu de la culpabilité du capitaine. Pour lui, son ancien étudiant est un traître, un espion au service de l’Allemagne, et un Juif. Quelque temps plus tard, il prend la direction du service des renseignements. L’institution végète, les dossiers s’empilent dans la poussière.

Lorsque Picquart exhume celui d’Alfred Dreyfus, il s’aperçoit que les accusations ne reposent sur aucun élément probant. Le jeune officier croupit au large de Cayenne, tandis que le véritable traître court toujours. Contre ses supérieurs qui tiennent à maintenir le couvercle sur l’affaire, Picquart réunit les preuves de l’innocence de Dreyfus. Puis il rencontre Zola.

Polanski nous plonge à la fois dans la réalité du XIXe siècle et dans sa représentation. Son Paris est fidèle à celui de ses personnages, mais aussi à celui des toiles d’Orsay, aux trottoirs de Caillebotte, aux nuits de Toulouse-Lautrec.

« J’accuse » n’en est pas moins un film de notre temps. Il raconte la force des individus que la machine d’Etat s’entête à broyer, la solitude de ceux que l’on appelle aujourd’hui « lanceurs d’alerte ». Il décrit surtout les fils complexes qui relient le devoir au courage. Le devoir d’obéir à sa hiérarchie, le courage de la contester. Le courage et le devoir de rester humain lorsque la foule devient meute et que l’époque se fait folle ».

Vous serez dégoûté de la France. Une France trop fidèle à elle-même. Une France où il suffit de soupçonner et d’accuser un juif, pour qu’elle laisse tomber son masque et permet à son antisémitisme de s’exposer sans honte, ni contrition.

Mettons de côté le tournant venant de la publication du fac-similé du bordereau par le journal Le Matin en novembre 1896. L’écriture du coupable est placardée dans tout Paris et, inévitablement, elle est reconnue : c’est celle d’Esterhazy. Mathieu Dreyfus en est informé et Lucie Dreyfus porte plainte contre Esterhazy. Auguste Scheurer-Kestner intervient alors officiellement, et devient la cible des nationalistes et des antisémites. Le haut commandement vole au secours d’Esterhazy. Devant les risques présentés par les interrogations de l’opinion publique et l’éventuelle mise en place d’une enquête parlementaire en conséquence, il n’a d’autre choix que de faire comparaître Esterhazy en conseil de guerre. L’intérêt de cette décision pour les militaires est de fermer définitivement la voie juridique à la révision de l’affaire Dreyfus par un acquittement contre lequel il ne peut pas y avoir d’appel. L’audience est ouverte le 10 janvier 1898. Adroitement manipulés, l’enquêteur, de Pellieux, et les militaires magistrats acquittent le véritable traître au terme d’une parodie de justice de deux journées, à l’issue d’un délibéré de trois minutes.

En réponse, Zola, qui avait déjà écrit trois articles assez modérés dans Le Figaro, décide de frapper un grand coup au travers d’une lettre ouverte au président de la République.

Ce qui m’a marqué le plus dans toute cette histoire, n’a pas été l’affront, la souffrance de Dreyfus et de tous ceux qui ont subi les conséquences de leur droit à la parole comme Emile Zola qui fut poursuivi en cour d’assises devant un tribunal civil et non militaire. Zola est condamné au maximum de la peine et s’exile à Londres, ses biens sont vendus. Zola gagna beaucoup en renommé mais paya de sa vie ce privilège lorsqu’il mourut le 29 septembre 1902 dans son domicile suite à une asphyxie de gaz survenant d’émanations toxiques produite par sa cheminée. Zola n’avait que 62 ans. Sa mort, qualifiée d‘accident n’a cessé de soulever questions et controverses.

Quant à Georges Picquart et son insistance qui lui valut l’incarcération en Afrique du Nord, il retourna triomphalement en France et devient ministre. Rang auquel il n’aurait jamais accédé s’il ne s’était pas impliqué dans l’affaire Dreyfus.

Mais, il y a toujours un MAIS – Dreyfus demeure pourtant la victime la plus injustement ignorée, maltraitée et mutilée. Non seulement il a été incarcéré dans d’horribles conditions pendant huit ans, mais en dépit de sa réhabilitation, il ne reçut aucun dédommagement de l’état, ni b un de l’armée, et doit se contenter de regagner son grade et son armée qui l’a si arbitrairement condamné.

Dans toute cette affaire, je retrouve le goût amer lassé par les composants de l’affaire Al-Doura et l’assassinat antisémite de Madame Sarah Halimi, la justice qui patauge et s’embourbe dans une France déboussolée et décapitée, qui conserve contre toute logique son effigie désastreuse d’antisémitisme.

Coupables, tous, si aujourd’hui nous crions notre colère, mais que dans deux ou trois jours nous tournons la page, impatients d’oublier que la barbarie tribale et l’islam théocratique totalitaire menacent notre peuple et notre civilisation.

Hélas, nos consciences sont impuissantes face au temps qui déroule.

FREDAL

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